Les meurtres "d'honneur" en Suède détuisent, 20 ans après, la douleur du meurtre de Fadime est vive.

Fadime a été exécutée par son père. Son délit ? Elle est tombée amoureuse d'un Suédois,

20 ans plus tard, la douleur du meurtre ne s'est pas encore apaisée.

Photo : Credit: Björn Larsson Ask/TT/ Archive 2002

Fadime a été assassiné par son propre père le 21 janvier 2002 à Uppsala en Suède, parce qu'elle a choisi un petit ami suédois plutôt qu'un cousin.

Fadime était une jeune femme kurde femme émigrée en Suède qui fut la victime d'un crime d'honneur.

Pendant quatre ans, le père de Fadime Sahindal avait menacé de la tuer. Elle avait pris un risque et est allée dire au revoir à sa mère et à ses sœurs avant de partir étudier en Afrique.

Juste avant 22 heures ce jour là, alors qu'elles étaient assises dans l'appartement de sa sœur à Uppsala. Son père a fait irruption et a tiré sur Fadime dans la tête. Elle est morte dans les bras de sa mère.

Fadime, 26 ans, a payé le prix ultime pour être tombée amoureuse du mauvais homme et avoir défié les valeurs patriarcales de sa culture. Son père, un fermier kurde analphabète qui a déménagé en Suède en 1980. Sa famille est arrivée quatre ans plus tard, alors que Fadime avait sept ans.

Alors que la jeune femme n'était pas autorisée à parler aux enfants suédois depuis son arrivée dans le pays, elle est tombée amoureuse d'un garçon suédois appelé Patrik Lindesjö lors d'uncours d'informatique. Fadime ne se faisait aucune illusion sur la réaction de son père. Elle savait qu'il penserait qu'elle déshonorait la famille. Ils ont gardé leur relation secrète pendant un an. Lorsque son père l'a finalement découvert, sa première réaction a été de les battre tous les deux.

Son père l'a désavouée mais le couple a refusé d'être intimidé et les parents de Patrik sont allés dans la famille de Fadime pour proposer en son nom, mais ont été refusés. Fadime a déménagé dans une autre ville, seulement pour être poursuivie et menacée par son frère. La police lui a simplement conseillé d'arrêter de parler à sa famille.

Au lieu de cela, Fadime s'est tournée vers la presse, donnant des interviews sur les conditions auxquelles sont confrontées les filles kurdes en Suède. A elle seule, elle a lancé un débat sur l'intégration et les doubles standards. L'inaction de la police face aux menaces de son père a exaspéré le public.

Puis, le 3 juin 1998, alors que le couple s'apprêtait à emménager ensemble dans un appartement, Patrik a été tué lorsque sa BMW s'est écrasée contre un pilier en béton. Une enquête policière, qui n'a rien trouvé de suspect, vient d'être rouverte.

Les obsèques de Fadime Sahindal ont lieu le 4 février 2002 à la Cathédrale d'Uppsala. Une foule de plusieurs milliers de personnes s'est réunie pour cet hommage, notamment des personnalités de premier plan dont la princesse héritière Victoria de Suède, la présidente du parlement Birgitta Dahl et la ministre de l'intégration Mona Sahlin, mais aussi de nombreux anonymes.

Fadime avait ensuite été enterrée lors d'une cérémonie privée au vieux cimetière d'Uppsala.

Fadime apparut pour la première fois sur la scène publique suédoise en 1998 après avoir déposé une plainte contre son père et son frère qui la menaçaient de mort. Elle s'exprima publiquement à de nombreuses reprises sur la situation des jeunes femmes immigrées mises en porte-à-faux entre leur pays d'adoption et leurs traditions . Elle s'exprima notamment devant le parlement suédois le 20 novembre 2001.

Le père de Fadime, Rahmi Sahindal, est appréhendé dans la nuit qui suit l'assassinat et reconnait les faits dès son premier interrogatoire le 22 janvier 2002.

Le 3 avril 2002, Rahmi Sahindal est reconnu coupable d'assassinat par la cour d'Uppsala sur la foi notamment de ses aveux et du témoignage de sa fille Songül. Il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Le 24 avril 2002, Rahmi Sahindal fait appel de sa condamnation. Devant la cours d'appelde Svea, il revient sur ses aveux et affirme qu'une personne de sa connaissance qu'il refuse de nommer, a commis l'assassinat et l'a ensuite forcé à en endosser la responsabilité. Son épouse, la mère de Fadime, va témoigner en sa faveur. La cour d'appel estime cette nouvelle version des faits peu crédible et confirme le 31 mai 2002 la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité.

Le 21 janvier 2012, un petit parc situé en face de l'hôtel Hörnan dans le centre d'Uppsala est renommé en son honneur. Un crime qui a particulièrement rendu la Suède triste.

Aujourd'hui encore la plaie reste ouverte et saignante. Sa ville, Uppsala prépare des cérémonies commémoratives pour le 20ème anniversaire de son assassinat.